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PARIS BOMBARDÉ.

gouvernements précédents et assez peu soucieux de votre honneur pour commettre le crime que vous reprochez à vos ennemis ?

Ah ! vraiment, ceux qui vous observent avec patience et impartialité, ceux qui, d’abord, vous étaient peut-être intimement favorables, parce qu’il leur semblait que vous représentiez quelques-unes des aspirations légitimes de Paris, ceux-là, vous voyant agir en tyrans étourdis, seront bientôt dans l’impossibilité de garder aucune illusion sur votre compte, et, après avoir essayé de vous estimer par amour de la liberté, seront, par amour de la liberté, obligés de vous mépriser enfin !

XXXVIII.

Cela était-il vrai ? Je ne pouvais y croire. Était-il possible que Paris, une seconde fois, fût bombardé ? et bombardé par qui ? par des Français. En dépit du danger qu’il y avait, disait-on, à se rapprocher de Neuilly, j’ai voulu voir les choses de mes propres yeux, et, ce matin, 8 avril, je suis allé aux Champs-Élysées.

Jusqu’au rond-point, rien de particulier, si ce n’est plus de solitude que les jours précédents. L’omnibus s’arrête à la hauteur de l’avenue de Marigny. Une Anglaise, que le conducteur prie de descendre, me demande son chemin ; elle voudrait aller rue Galilée, mais elle n’ose pas suivre la grande avenue ; je lui indique une rue latérale, et je continue mon chemin. Voici un cordon de gardes nationaux ; espacés de dix en dix pas, ils interrompent la circulation.