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L’ORDRE DANS LE DÉSORDRE.

relativement peu importantes. » D’où leur vient donc cette ardeur, qui survit au premier élan ? Est-elle entretenue par les récits faux ou vrais qu’on répand à foison des cruautés versaillaises ? « L’assassinat » de Duval, « l’assassinat » de Flourens, les prisonniers fusillés, les vivandières violées, toutes ces inventions coupables — sont-ce des inventions ? hélas ! la guerre civile nous rend si barbares ! — sont bien de nature à surexciter l’enthousiasme de la haine, et ils marchent à une défaite probable de l’air dont on irait à une victoire certaine. Ah ! égarés ou non, coupables même, et quel que soit le motif qui les pousse, ils sont braves ! et, quand ils passent ainsi, ils sont beaux. Oui, malgré les haillons qui servent d’uniformes au plus grand nombre d’entre eux, malgré la démarche avinée de quelques-uns, ils sont, dans l’ensemble, superbes ! et la raison des plus froids partisans de l’ordre à tout prix essaye en vain de résister à l’admiration qu’inspirent ces hommes qui vont mourir !

Il faut reconnaître aussi qu’il y a, dans les commandements, moins de désordre qu’il ne pourrait y en avoir. Tous ces bataillons ont l’air de savoir à qui ils obéissent. Ils vont, les uns à l’Hôtel de Ville, les autres à la place Vendôme, plusieurs dans les forts, quelques-uns aux avant-postes ; les marches, les conlre-inarches se combinent sans confusion ; les munitions, en général, ne manquent pas aux combattants. Ils reçoivent des vivres. Si éloigné que l’on soit d’estimer les chefs des fédérés, il faut convenir qu’il y a quelque chose de très-remarquable dans cette rapide organisation de toute une armée, au milieu du plus complet des bouleversements