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LE ROI VIERGE

rick, écartant les importuns, disant aux gens qui traversaient les chambres d’en bas : « Fermez tout doucement les portes ! » pour qu’aucune présence, pour que pas un bruit même ne vînt interrompre la longue rêverie du petit prince pâle, dans la salle déserte où il ne pensait à rien peut-être, pendant qu’elle pensait à lui, sur l’escalier.

Dès les premiers aveux échangés, ils furent deux âmes ravies, éperdûment, délicieusement confondues. Lui, dix-sept ans, elle, quinze, ils étaient comme deux petites églantines sur une même branche, l’une ouverte déjà, l’autre bouton encore, mais toutes proches et n’ayant qu’un seul parfum. Leur double joie, éclose un matin d’avril parmi l’adolescence des rosées, des feuillées et des cieux légers, s’accordait si bien à la grâce tendre des choses, lui était si ressemblante, que l’on n’aurait pu dire si c’était un amour dans le printemps ou le printemps lui-même dans de l’amour épars. Ils connurent les longues promenades, la main dans la main, en silence, pendant que le lever de l’aube met à l’horizon un sourire de rose, et pendant qu’un autre jour qui se lève dans les cœurs met aux lèvres un sourire