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FRÉDÉRICK

à l’heure, mais deux mélodies joyeuses, ardentes, presque folles, se mêlant, se fuyant, se rejoignant, comme le double vol sonore dans le soleil de deux libellules amoureuses.

Tout à coup, la flûte se tut, la voix d’oiseau s’éteignit dans un bruit d’envolement.

Le pâtre s’était retourné, pâle, d’un air de colère, à cause du bruit d’un pas.

Quelqu’un s’approchait en effet, gravissant les neiges, un très jeune homme, gras, blond, rose, face en belle humeur sous une toque où riaient des plumes ; une corne de buffle sautait sur la hanche de son habit de chasse, vert, à galons d’or.

— Que veux-tu, Karl ? demanda le pâtre d’une voix brusque.

— Sire, dit l’autre en s’inclinant très bas, une très grave circonstance…

— Ah ! le prince Flédro est revenu ? Il m’apporte…

— Hélas, non, sire ! Mais votre mère est arrivée de Berlin et désire voir Votre Majesté.

— Tu m’as donc trahi ? dit le roi d’un ton de colère, avec un pas en avant.

— Que Votre Majesté daigne prendre garde !