Page:Mendès - Le Roi Vierge - 1881 (leroiviergeroma00mendgoog).djvu/151

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
143
GLORIANE

sous la barbe des loups, le factotum démêlant d’un coup d’œil dans la foule la rondeur d’une hanche ou la courbe d’une épaule, — car il n’aurait pas eu besoin du visage entrevu pour reconnaître la Frascuèla, — et parfois enflant les narines comme pour humer une odeur espérée. Recherches vaines. Gloriane n’était pas à l’Opéra, mille dious ! Ils sortirent, las, brisés, suants, mornes.

Le cocher demanda :

— Où allons-nous ?

— Partout où l’on danse ! cria Brascassou.

Cette nuit-là, d’autres bals, qui défient par la modicité du prix d’entrée la concurrence de l’Opéra, allumaient leurs girandoles et faisaient grincer leurs orchestres. Le fiacre s’arrêta sur les boulevards extérieurs, dans les quartiers lointains de la ville, devant de hauts portiques blancs et or, que débordent par bouffées des musiques et des rires, et que surmonte un demi-cercle, çà et là éteint, de globes lumineux. Pris à la gorge par d’écœurants arômes, aux yeux par d’acres fumées, le prince et le coiffeur traversèrent les vastes salles, où des cohues plus viles, avec un secouement éperdu de haillons carnavalesques, se