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LE ROI VIERGE

était une créature magnifiquement monstrueuse, inquiétante pour lui, chétif, mais capable d’affoler d’autres hommes. Il avait découvert une force désordonnée, excessive, qui pouvait être mise en usage. De là vingt combinaisons. La vapeur rompt les chaudières closes ; mais, bien employée, elle entraîne les wagons. Brascassou songeait que cette vapeur-là pouvait faire tourner la roue de sa fortune. Il voyait la Frascuèla, lâchée en apparence, mais retenue et guidée par lui, se précipiter à travers le monde, hardie et chaleureuse, se donnant, se refusant aussi, — il la déciderait à cela, — et toujours, possédée ou désirée, allumant les âmes, les cœurs, les corps ! Dans les ruines de tant d’incendies, il trouverait bien, lui Brascassou, qui ne perdrait pas la tête, de quoi amasser quelque petite épargne, dont il irait vivre honnêtement, sur ses vieux jours, à la campagne, près d’une rivière où il pêcherait à la ligne. Tout en formant ces projets, il achetait des tomates et des piments doux, qui, cuits à point dans l’huile autour d’une tranche de veau bien dorée, feraient un ragoût délicat ; il était fort gourmand de ces petits plats de ménage.