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taient la souquenille de Scapin ou de Mascarille, et de la sorte, le comédien-poète n’avait pas besoin de coflfre ni de malle, car il pouvait mettre sa garde-robe, pliée, dans son portefeuille, en place de billets de banque. Vous pensez qu’un homme qui avait eu de telles vicissitudes dans la banlieue de Carpentras ou de Draguignan n’était pas pour s’épouvanter de la misère parisienne. Allons donc ! il en avait vu bien d’autres, et il espérait en voir bien d’autres encore. Pourtant les jours étaient durs et quelquefois effroyables. Je me souviens d’une histoire lugubre qu’il m’a contée un jour ; et il ne mentait jamais.

J’ai peut-être oublié quelques détails, mais j’affirme la vérité du fond.

Un de nos amis, pauvre comme nous l’étions alors, avait perdu une femme qui lui était chère, et il n’avait pas de quoi faire enterrer la morte, pas de quoi payer les hommes qui viendraient prendre le cercueil. Il y a de ces situations terribles. Parmi ceux d’entre nous qui, aujourd’hui, ont cessé de connaître les tristesses du dénuement, il y en a beaucoup qui» tout à coup, la nuit, frissonnent, à cause