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ceaux que vous venez d’entendre ne suffisent-ils pas à révéler un adorable et délicat esprit, un peu tourmenté sans doute, mais si clair et si précis dans l’expression même des plus fugitives rêveries ?

Je ne chercherai pas à dissimuler que Stéphane Mallarmé a quelque peu modifié sa manière primitive, et qu’il s’est rendu moins aisément intelligible, surtout dans une églogue sensuelle, très païenne et si moderne, qu’il a intitulée L’après-midi d’un Faune. Raconter ce poème ? il serait plus aisé peut-être de noter le chant d’un rossignol. L’impression qu’on en garde, c’est d’avoir été Faune soi-même, de s’être mêlé aux voix des eaux amoureuses, aux langueurs de l’heure fauve, à la luxure des roseaux souples qui gardent depuis la disparition des baigneuses la forme d’un enlacement vide, et l’on est sur le point de s’écrier avec le rôdeur des marécages siciliens :


               Tâche donc, ô maligne
Syrinx, de refleurir aux lacs où tu m’attends ;
Moi, de ma rumeur fier, je vais parler longtemps
Des déesses, et par d’adorables peintures,
Enlever à leur ombre encore des ceintures.