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Alors la porte s’ouvre, et, debout sur le seuil,
Ayant le flamboiement du couchant derrière elle,
Une femme apparaît, blanche et surnaturelle,
Le sourire à la lèvre et lextase dans l’œil.

Le vieillard, en sursaut, se dresse vers la porte !
Il regarde et s’étonne, il touche et ne croit pas ;
Puis, les deux bras au ciel, et reculant d’un pas :
« Dieu de Jacob, dit-il, que nous veut cette morte ?

— Morte ? non, prêtez-moi l’oreille, ouvrez les yeux.
J’étais morte en naissant, mais ce jour me délivre,
Et mille nouveaux-nés ont moins d’heures à vivre
Que je ne compterai de siècles dans les cieux !

— Tu vis ! qui l’a permis ? Par quels juges absoute,
Offenses-tu mon seuil de ton pied criminel ?
Ô Seigneur ! n’est-il plus de lois dans Israél ?
Ô peuple ! n’est-il plus de pierres sur la route ?

— Un nouveau laboureur ensemence les champs
Le Fils pardonne à ceux que le Père châtie,
Et pour que son Église, un jour, en soit bâtie,
Les cailloux du chemin ne seront plus méchants.