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aiment à regarder les soleils couchants ; ils sont attirés vers les tombes encore plus que vers les berceaux, et le jour où le souvenir n’existerait plus, il n’y aurait plus de poésie ! Les chasserons-nous donc, couronnés de fleurs ou d’épines, de la République du Fait ?

Non ! Ils seront parmi nous comme des enfants divins. Les enfants sont plus près du passé. Tandis que d’autres, politiques, philosophes, historiens, accompliront leur besogne sévère, ils seront le charme et la consolation. Ces légendes, dont la science aura fait justice, ils vous les conteront encore, non pour vous les faire croire, mais pour vous les faire aimer. Par une réaction naturelle et nécessaire, ils reculeront d’autant plus que, vous, vous avancerez. Ils ne nieront pas la vérité et n’imposeront pas le mensonge, mais sans vous détourner de l’une ils vous raviront avec l’autre. Ce sera non seulement une joie pour eux, mais un devoir. Les héros qui n’ont peut-être pas existé, ils vous les montreront, pour votre plaisir. Ils seront les évocateurs sacrés de morts qui n’auront jamais vécu. Et si vous n’ajoutez point foi à leur rêverie, vous subirez l’influence pourtant de tout ce que