Page:Mendès - La Légende du Parnasse contemporain, 1884.djvu/279

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la foi elle-même. Une seule erreur prouvée peut engendrer un soupçon général. « Eh bien ! soit, disent-ils, doutons. Qu’importe ! ce n’est pas le passé qui nous intéresse, c’est l’avenir. Nous ne nous soucions pas de ce que nous avons été, mais de ce que nous serons. Regarder en arrière, empêche de marcher en avant. Il s’agit bien de Charlemagne ou de Guillaume Tell à cette heure ! Hier est sans importance pour nous qui bâtissons demain. » Ce raisonnement ressemble un peu trop à celui d’un architecte qui dirait : « Je n’ai pas à m’occuper des fondements puisque j’élève la toiture ! » Puis, tout à coup, la maison s’effondre.

Mais que faire ? Restaurer les croyances anciennes ? non. La vérité historique, quoique cruelle, vaut d’être aimée pour elle-même ; la certitude acquise peut remplacer dans l’esprit d’un peuple la foi, hélas ! perdue. Maintenant, d’ailleurs, ce travail de reconstruction, fût-il salutaire, serait impossible : on ne rebâtit pas le temple quand les pierres dont il était formé, sont cassées, émiettées, en un mot, poussière. Foulons ces ruines et même entassons des ruines encore, puisque telle est la loi fatale de ce siècle ;