Page:Meillet - La méthode comparative en linguistique historique, 1925.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
30
des preuves employées

la langue commune et chacune de ces langues obéissent à des règles fixes et qui se laissent exactement formuler. C’est ce que l’on appelle « lois phonétiques ».

À p, t, k de l’indo-européen répondent en germanique f, þ, x (d’où h) et, en certaines conditions, ƀ, đ, ɣ ; à b, d, g de l’indo-européen, répondent germ. p, t, k ; à bh, dh, gh de l’indo-européen répondent germ. b, d, g (ƀ, đ, ɣ en position intervocalique). Ce système régulier de correspondances en germanique est ce que l’on appelle la « mutation consonantique », ou loi de Grimm (vue en grande partie par Rask, un peu avant Grimm, mais posée comme loi par Grimm). La régularité des correspondances entre la « langue commune » initiale et les langues ultérieures exprime le fait que les changements de la prononciation n’atteignent pas isolément tel ou tel mot, telle ou telle forme, mais qu’ils portent sur le système phonique même.

Du principe de la méthode, il résulte que des règles de correspondances peuvent être posées entre la langue initiale et chacune des langues qui la continuent, mais non entre les diverses langues continuant une même langue commune. On peut poser que p initial de l’indo-européen est représenté en grec et en sanskrit par p, en gotique par f, ainsi dans gr. patḗr, skr. pitā́ et got. fadar « père », et que initial de l’indo-européen devant o est représenté en grec par p, en sanskrit par k et en gotique par hw, ainsi gr. póteros, skr. kataráḥ, got. hwaþar « lequel des deux ». Les deux correspondances constatées en fait :

gr. p = skr. kp = got. hwf
gr. p = skr. k = got. hw