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le phonétisme

vées ; mais on les restitue par la connaissance qu’on a du système indo-européen et par les divergences observées entre les langues historiquement connues.

L’observation des faits singuliers ne dispense pas d’examiner l’ensemble de la morphologie. Toute morphologie constitue un système complet. D’après l’ensemble des concordances, il faut donc restituer le système de la « langue commune », dans la mesure du possible. Et, ceci fait, il faut voir comment à ce système s’opposent les systèmes morphologiques, souvent tout différents, on l’a vu, des langues en lesquelles la langue initiale s’est transformée. Les particularités sont le moyen décisif de preuve. Mais la démonstration n’est définitivement acquise que lorsqu’on a confronté système morphologique à système morphologique et qu’on a vu comment il est possible de passer du système initial aux systèmes ultérieurs.

On observe souvent alors que des caractères généraux du système ancien se maintiennent longtemps. Ainsi, en indo-européen commun, où chaque mot portait en lui-même la marque de son rôle dans la phrase, le nom se distinguait nettement du verbe. Or, encore aujourd’hui, dans les langues indo-européennes, la distinction du nom et du verbe est demeurée nette partout.


Le phonétisme comporte aussi la mise en présence d’un système ancien et de systèmes nouveaux, tous ces systèmes pouvant différer les uns des autres aussi profondément qu’il est imaginable.

Mais les différences d’un système à l’autre ne sont pas capricieuses. S’il est souvent impossible de reconnaître des correspondances régulières entre deux des langues issues d’un original commun, les correspondances entre