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II.

LES LANGUES COMMUNES.


De ce que la méthode comparative est la seule qui permette de faire l’histoire des langues il résulte que, tant qu’une langue est isolée, elle est dénuée d’histoire. Entre l’état du basque au xvie siècle et l’état du basque aujourd’hui, il y a des différences ; mais les changements ne sont pas essentiels ; en substance, la langue est restée la même. Si donc on ne trouvait pas de moyen de rapprocher le basque de telle ou telle autre langue, il n’y aurait aucun espoir d’en faire jamais l’histoire. En revanche, si les essais faits — par M. Marr et M. Ostir, d’une part, par M. Trombetti, de l’autre, — pour rapprocher le basque d’un grand groupe de langues du bassin de la Méditerranée, et spécialement des langues caucasiques, aboutissent, le basque, sortant de son isolement, entrera dans l’histoire.

Pour tous les groupes actuellement établis et étudiés d’une manière méthodique, le moyen de faire le rapprochement est de poser une « langue commune » initiale (Ursprache, comme on dit en allemand). Ce n’est rien que de poser des rapprochements partiels : chaque fait linguistique fait partie d’un ensemble où tout se tient. Il ne faut pas rapprocher un fait de détail d’un autre fait