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difficultés de la preuve

à þ et k à x ; en brittonique, au contraire, ces occlusives deviennent des sonores : t passe à d, et k à g. Le changement ne s’applique pas aux sonores géminées qui sont plus fortement articulées que les simples. — La différence de traitement entre les sourdes gaéliques et les sourdes brittoniques doit tenir à des propriétés des deux langues considérées ; car, en gaélique, certaines consonnes sonores par nature tendent à s’assourdir, ce qui n’arrive pas en brittonique. En gaélique, le w initial a passé à f, tandis que, en brittonique, il a donné  ; en gaélique, le y initial a passé à h qui s’est amui, tandis que au moins y subsistait en brittonique. — Le linguiste observe la coïncidence. Qui admet que la forme des changements phonétiques tient avant tout à la structure phonique de la langue tiendra la coïncidence pour significative. Mais tout le monde ne souscrira peut-être pas à cette conclusion.

Les concordances de faits particuliers ont d’autant plus de valeur probante que ces faits répondent moins à des tendances générales. Pour établir que les langues italiques proviennent d’une même langue commune (d’origine indo-européenne) que les langues celtiques, on dispose de quelques coïncidences. L’une des plus curieuses est que l’ancienne forme du nom de nombre « cinq », qui est *penkʷe (páñca en sanskrit, pénte en grec), est passée à italo-celt. *kʷenkʷe, comme on le voit par coic de l’irlandais et quinque du latin. La valeur probante de la concordance est difficile à déterminer. On sait que le fait n’est pas particulier à ce nom de nombre ; le même phénomène se retrouve partout où l’on rencontre p et dans deux syllabes consécutives en italique et en celtique. — L’innovation ne résulte manifestement pas d’une