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diphtongue *ey parallèle à oy. Elle est issue d’une diphtongue
indo-européenne en i, par exemple dans dēz դէզ « amas », cf. gr.
 toichos « mur », ou, dans les emprunts, d’un ai iranien (persan ē),
par exemple dans tēg տէգ « lance » de *taiya (persan tëy), ou enfin,
dans les formations proprement arméniennes, de e suivi de y, ainsi
à l’imparfait berër բերէր « il portait », de *bere~yr. De plus la
triphtongue *iay est devenue ë է dans ter էր « seigneur », de *ti-ayr ; le génitif team տեառն pareil au génitif anomal arn առն de ayr այր « homme » et le rapprochement avec tikin irt էԿէն « maîtresse » (de *tëet kin կին « femme ») montrent qu’il faut tirer tër
տէր de *ti-ayr ; la réduction de ey à e fermé s’explique par le voisinage des points d’articulation des deux parties de la diphtongue.
Les autres diphtongues ont toutes été simplifiées par la suite dans
les dialectes arméniens ; ainsi la simplification de ey en arménien
ancien n’est que le premier moment d’une transformation qui est
devenue générale postérieurement à la fixation de l’arménien par
l’écriture. Dans les plus anciens manuscrits, է ne note jamais une
voyelle issue d’une voyelle simple ; mais, de bonne heure, les timbres
de ե et de է ont tendu à se confondre, et l’on observe une tendance de l’orthographe à noter e de toute syllabe finale par է et
non par ե ; ainsi le Ve թե « que » des plus anciens manuscrits devient au moyen âge թէ, forme qui a passé dans les textes imprimés.

Les autres diphtongues arméniennes résultent de divers
 changements et ne répondent à aucune diphtongue indo-européenne ; ainsi ea de keam Լեամ « je vis » repose sans doute sur *-iyà-, cf. *-iyôdans gr. fiuovai ; ea des aoristes en ç g, tels que
gorceaç գործեաց, sur *-is-â (voir § 84) ; ea du génitif jean ձե ա*ե « de la neige » repose sur -*iy°n-, en regard de *-iyonde gr. /tôvoç, etc. De même ew de ewt’n եւթն « sept » a été expliqué(§ 11) par *ep ; iw de jiwn ձիւն « neige » représente *-iyôou
-iyodevant nasale, cf. gr. ymv /w’va, etc. ; rniws միւս « autre »
est *mi-ews « un encore » ; iwr իւր « de soi » est *sewe-r ou *sewo-r,
cf. gr. é(F)é, é(F)oç ; il y a une hésitation graphique entre եւ et իւ,
par exemple albewr աղբեւր ou albiwr աղբիւր « source » ; ew issu
 d’un ancien ew est noté iw dans iwr իւր « de soi », mais devant
w լ issu de labiale, e ե subsiste, par exemple dans ewVn եւթն