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-an –ան, beran բերան « ils ont été portés ». Le détail de ces formes reste inexpliqué.

En ce qui concerne le sens, l’aoriste arménien n’est pas éloigné de l’aoriste grec, ainsi lk‘i լքի vaut ἔλιπον (elipon), etc.

e) Imparfait.

95. — L’imparfait de tous les types est constitué par l’addition de certaines caractéristiques aux thèmes du présent ; on notera seulement que le type en -e –ե– et le type en -i –ի– ont un même imparfait dont le modèle est fourni par l’imparfait de em եմ « je suis » ; à berem բերեմ et à berim բերիմ répond une forme unique berei բերեի « je portais » et « j’étais porté ». Les paradigmes sont :

ei եի « j’étais » layi լայի « je pleurais » lnui լնուի « j’emplissais »
eir եիր layir լայիր lnuir լնուիր
ēr էր (de *eyr) layr լայր lnoyr լնոյր de *lnu-yr goyr գոյր
eak‘ եաք layak‘ լայաք lnuak‘ լնուաք « il était »
eik‘ եիք layik‘ լայիք lnuik լնուիք
ein եին layin լային lnuin լնուին goyn գոյին

Sauf l’insertion de y յ dans le type en -a- –ա–, le parallélisme est parfait. Au moyen âge le e- ե– employé dans les plus anciens manuscrits pour ei եի, etc. a été remplacé par ē- Է– qui a passé dans les éditions modernes.

Ces formes sont en partie parallèles à celles de l’aoriste ; elles ont -r –ր à la 2me personne du singulier, -ak‘ –աք à la 1ère du pluriel ; la 3me personne du singulier a une syllabe de moins que les autres, dont elle diffère d’ailleurs par l’addition de -r –ր. Mais ce qui appelle l’attention, c’est le -i- –ի– qui se retrouve presque à toutes les personnes : bere-i բերե-ի « je portais » a l’aspect d’une forme composée comme l’imparfait vieux slave nesě-achŭ « je portais » ; si l’on se souvient que le subjonctif beriçem բերիցեմ a, au moins en apparence, l’aspect d’un composé (v. § 90), on est tenté de voir dans -i –ի, ir -իր » etc. des formes d’un prétérit de « être » ; *i répondrait à homérique ἦα (êa) skr. âsa, c’est-à-dire à l’ancien parfait ; la 3me personne *-y-r aurait un aspect particulier parce qu’elle reposerait sur une ancienne forme monosyllabique d’imparfait *ēst, cf. skr. âḥ, gr. ἦς (ês). L’emploi du thème du présent avant un ancien prétérit