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a ա, sans nasale : yusam յուսամ « j’espère » (aor. yusaçay յուսացայ) ; avec nasale : zarmanam զարմանամ « je m’étonne » (aor. zarmaçay զարմացայ). — 4° u ու, sans nasale : henum հենում « je couds » (aor. heni հենի) ; avec nasale : aṙnum առնում « je prends » (aor. ari աւի). De plus, dans la série en i ի, certains présents offrent une caractéristique č̣ չ, ainsi p‘axč̣im պախչիմ « je fuis » (aor. p‘axeay փաիւեայ).

Ces types arméniens résultent du mélange de plusieurs formations originairement distinctes et de réfections analogiques étendues.

a) Type en -e- –ե–.
α) Présent sans nasale.

75. — Les trois présents suivants remontent à d’anciens thèmes radicaux du type thématique, ce qui se reconnaît à leur aoriste primaire (sans ç ց), qui continue un ancien imparfait :

berem բերեմ « je porte », aor. beri բերի, cf. skr. bhárāmi, gr. φέρω (pherō)), lat. ferō, irl. berim, got. baira, v. sl. berõ « je prends » ;

acem ածեմ « je conduis », aor. aci ածի, cf. skr. ájāmi, gr. ἄγω (agô), lat. agō « je conduis », v. isl. aka « conduire » ;

hanem հանեմ « je tire », aor. hani հանի, cf. peut-être skr. sanóti « il gagne », optat., sánema « gagnons », participe sánant-.

Les autres présents sont secondaires, en général dénominatifs ; -e- –ե– y répond alors non à i.-e. e comme dans bere- բերե– gr. φέρε (phere), mais à *-e-ye-, skr. -ayá-, gr. -ε(y)ε- (type φιλέω (phileô)) ; il a pu y avoir mélange avec le type des causatifs et itératifs en *-eye- (skr. -'aya-), et gorcem գործեմ « je travaille, je fais, j’agis » (aor. gorceçi գործեցի) peut être considéré à la fois comme dérivé de gorc գործ « œuvre » et comme représentant un i.-e. *worg'-eye-, de même que le grec φορέω (phoreô) peut être dénominatif de φόρος (phoros) ou issu de i.-e. *bhoreye- (itératif) ; on s’explique ainsi que le type arménien en -e- –ե– fournisse les dénominatifs transitifs exprimant une action, comme əntrem ընտրեմ « je choisis » (aor. əntreci ընտրեցի) de əntir ընտիր « choisi », et non des dénominatifs exprimant un état ou l’entrée dans un état, comme lat. seneō « je deviens vieux ». Les dénominatifs en -e- –ե– qui ont cette signification sont tirés de thèmes quelconques et non plus seulement des thèmes en -o- (anciens thèmes en *-e-|-o-).