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APPENDICE.
I. COMPOSÉS.

69. — L’arménien a gardé la composition dans une très large mesure ; il a et des composés de dépendance, du type gr. πατράδελφος (patradelphos) « frère du père », ainsi cov-ezr ծով—եզր « bord de la mer », et des composés possessifs du type gr. μεγαλόδοξος (megalodoxos) « qui a une grande gloire », ainsi mecatun մեծատուն « qui a une grande maison, riche » ; les composés les plus remarquables sont ceux dont le second terme est un nom rattaché au thème verbal de l’aoriste ; ce type a pris naissance dans les cas où un nom d’agent à suffixe *-ā- se trouvait au second terme, ainsi ən-ker ընկեր « compagnon » (« qui mange avec »), instr. ənkeraw րնկերաւ ; akarnates ակարնատես « témoin oculaire », etc. Ces deuxièmes termes ont été rapprochés des aoristes keray կերայ « j’ai mangé », 3me pers. eker եկեր ; tesi տեսի « j’ai vu », 3me pers. etes ետես, etc. ; et dès lors sur les aoristes à suffixe -c̣- —ց— comme kec̣i կեցի « j’ai vécu », 3me pers. ekeac̣ եկեաց on a formé des deuxièmes termes de composés, ainsi miaynakeac̣ միայնակեաց « qui vit seul » ; de même anmoṙac̣ անմոռաց « inoubliable », de moṙac̣ay մոռացայ « j’ai oublié », moṙac̣eal մոռացեալ « ayant oublié », etc. ; toutefois ceci n’arrive pas toujours là où le participe passé est en -c̣eal —ցեալ, et l’on a mardasēr մարդասէր « qui aime les hommes » en regard de sirec̣i սիրեցի « j’ai aimé », sirec̣eal սիրեցեալ « ayant aimé » (cf. § 84).

Originairement le premier terme du composé était le thème sans aucune désinence ; mais le thème n’est plus senti en arménien ; et c’est la forme du nominatif-accusatif singulier qui est employée à la place ; si le second terme commence par une consonne, une voyelle est insérée ; le grec a généralisé le o des thèmes en -o-, ainsi πατρ-ο-ϰτόνος (patr-o-ktonos) ; sans doute sous l’influence des composés empruntés à l’iranien, l’arménien a généralisé a des thèmes en -a-, ainsi hayr-a-span հայր-ա-սպան « qui tue son père ». — Au lieu du