Page:Meilhac et Halévy - Théâtre, III.djvu/243

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
231
ACTE PREMIER.
SAPHIR.

Vous me l’avez déjà dit, pas plus tard qu’hier à quatre heures et demie… je vous ai répondu que vous perdiez votre temps…

BOULOTTE.

Je le sais, mais ça ne m’empêche pas de l’aimer… Je t’aime pour un tas de raisons… D’abord, il y a un mystère dans ta vie. Un beau jour, t’as acheté cette cabane. D’où viens-tu ?… qui es-tu ?… Personne ne le sait… Les autres, je les connais ; toi, je ne te connais pas : je voudrais te connaître… Et puis, tu n’es pas un berger comme les autres… Qu’est-ce qui t’a bâti un justaucorps de satin comme ça ?… ce n’est pas le tailleur du village. Tes cheveux sentent bon et t’as les mains blanches. C’est pour tout ça que je l’aime !

SAPHIR.

Il n’y a rien de blessant dans ce que vous me dites… mais je ne vous aime pas !

BOULOTTE.

Pourquoi ça ?

SAPHIR.

Je n’ai pas à m’expliquer.

BOULOTTE.

Ah ! je le sais, moi… parce que tu aimes cette mijaurée qui demeure là…

SAPHIR.

Fleurette ?

BOULOTTE.

Oui, Fleurette… la bergère bien attifée ; mais sois tranquille, va, la première fois que je la rencontrerai, je lui administrerai une de ces danses !…

SAPHIR.

Vous ne ferez pas ça !