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composition du quatrième évangile ? C’est là une simple hypothèse que le lecteur peut admettre ou rejeter sans inconvénient. Mais celui qui l’admet peut demander quels étaient les rapports de ces écrits avec le quatrième évangile. Voilà ce que le fragment ne dit point ; il est cependant possible, à l’aide de certaines données, de le présumer avec quelque vraisemblance. Nous avons, dans une dissertation sur le but de l’évangile saint Jean (Quart, schrift. 1861, p. 37), fourni la preuve que cet évangile avait été écrit à l’occasion des agitations des Juifs, qui, après la destruction de Jérusalem, cherchaient à coaliser leurs forces pour raffermir le judaïsme transformé par eux en rabbinisme. Nous avons constaté (p. 60) que cette agitation n’était pas renfermée dans les limites de la Palestine, mais qu’elle s’étendait à toutes les synagogues dispersées dans l’Empire romain, et qu’en particulier elle était très-sensible en Asie Mineure. Il importe aujourd’hui de développer et d’éclairer ce que nous avons dit.

Il existait dans l’Asie Mineure deux provinces qui servaient de centre à l’activité juive : la Galatie et le Pont. Les Juifs du Pont, en particulier, entretenaient des rapports politiques avec la Palestine (Voy. Josèphe, Ant. XIX, 8, 1). Tacite nous montre (Hist. 3, 46) que lorsque la Palestine se soulevait, le Pont s’agitait aussi. Après la ruine de Jérusalem, les Romains avaient à combattre en même temps la révolte des Juifs dans le Pont et sur les bords du Jourdain. Lorsque Barchoba souleva une partie de la Palestine, il est probable qu’il entretenait des relations avec les Juifs d’Asie Mineure. Le rabbi Akiba n’habitait pas vraisemblablement la Cilicie, comme Graetz et Jost le prétendent : il est à croire qu’il habitait la ville Pontique de Zéphyrium. Alors même que ces conjectures ne Seraient point admises, nous produirions une autre preuve de la fermentation des esprits au nord de l’Asie. Cette preuve consiste dans la haine profonde dont les Juifs furent l’objet dans ces contrées ; une telle aversion devait avoir son point de départ dans les intrigues et les agitations de ce peuple mécontent. Il est impossible de ne pas reconnaître que la haine