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une assistance extraordinaire de Dieu. Toutefois les commentateurs sont loin d’être d’accord sur ce qu’il faut entendre par le don des langues. Saint Pierre, en sortant du cénacle, put miraculeusement se faire comprendre de milliers d’hommes qui ne se comprenaient pas entre eux. Mais, disent certains commentateurs, toutes les langues sémitiques ont quelques rapports entre elles. Saint Pierre se répétait souvent, il jetait à travers son discours les mots latins et grecs qu’il pouvait connaître. En tout cas il s’aidait de gestes expressifs et d’une action véhémente, ainsi que l’indiquent ces paroles autrement inexpliquables : Ces hommes sont ivres. Ces observations, faites par des auteurs protestants, nous semblent beaucoup trop réduire les limites dans lesquelles était renfermé le don des langues. Mais d’autre part plusieurs catholiques les ont peut-être trop étendues.

Quoi qu’il en soit, l’hypothèse que nous émettons ici, dit Aberle, n’est point invraisemblable en elle-même ; il n’y a aucun motif pour rejeter le fait en tant qu’affirmé par Papias lui-même.

Nous avouons que nous serions arrêtés par Eusèbe si nous étions obligés de le croire sur parole, lorsque, par suite d’un mauvais raisonnement, il affirme que Papias n’a point été l’auditeur immédiat de l’apôtre saint Jean. Mais cette allégation n’est point un fait historique emprunté à la tradition ; c’est une conclusion qu’il tire de la préface de l’ouvrage de Papias. Cette induction ne peut l’emporter sur le témoignage positif de saint Irénée (Contra hæreses, lib. v, cap. xxiii, 4). Ce Père de l’Eglise appelle expressément Papias non pas du nom vague de disciple de Jean, mais de celui d’Ἀκουστής, auditeur de l’Apôtre, expression qui ne peut s’appliquer qu’à un disciple immédiat. Irénée était parfaitement informé à cet égard, car il avait été disciple de Polycarpe, et Papias était l’ami dé l’illustre martyr. L’affirmation de M. Renan, d’après laquelle Papias n’aurait été que le disciple des disciples des Apôtres, n’a aucun fondement. Eusèbe se garde bien lui-même de parler de la sorte, et Papias désigne positivement Aristion et le prêtre Jean