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τῶν πρὸ αὐτοῦ κηρυξάντων τὸν λόγον τοῖς ἀνὰ πᾶσαν τὴν οἰκουμένην ἔθνεσιν.

« Lorsque le dernier de ces évangélistes, Jean, appelé le fils du tonnerre, devint tout à fait vieux, il s’éleva de cruelles hérésies, et d’après ce que nous ont raconté Irénée, Eusèbe et d’autres historiens fidèles appuyés sur la tradition, Jean dicta son évangile à son disciple Papias, d’Hiérapolis, homme de sainte vie (εὐβιότῳ), afin de compléter les discours de ceux qui avaient prêché avant lui aux nations de toute la terre. »

Le texte grec, lui aussi, est défectueux ; il a besoin d’être corrigé, ainsi que nous l’avons noté en le transcrivant. Ainsi Εὐβιώτῳ est évidemment pour εὐβιότῳ. Le copiste a changé l’ο en ω, comme il lui est arrivé dans le mot παρεδοσαν. Le qualificatif εὐβιότος est un mot bien connu dans le grec des derniers temps (Voy. Dio. Cass., 52, 39), et il est bien traduit par les mots latins bonæ conversationis. Cette correction forcée dissipe la difficulté dont parle Routh (l. c,p. 23), celle d’expliquer εὐβιότῳ, ce qu’il prenait pour un surnom de Papias.

D’après ce témoignage, il est clair que saint Jean dicta son évangile à Papias. La seconde citation s’accorde avec la première, et si, pris séparément, ces textes peuvent laisser des doutes sur le sens qu’ils expriment, ils s’éclairent par leur rapprochement.

Le fragment de Thomasius va plus loin que celui du P. Cordier : tandis que ce dernier affirme seulement que Jean a dicté à Papias son évangile, le premier ajoute que Papias a bien écrit : recte descripsit, ce qui exprime l’idée de καταγράφειν ὀρθῶς. Le professeur Aberle pense qu’il faut attacher à ces mots un autre sens que celui de la reproduction fidèle des discours de Jean : il croit qu’il s’agit ici de la forme grammaticale. Papias aurait, selon le docte exégète, écrit correctement ce que saint Jean lui dictait dans un grec moins pur. Papias, dit-il, en recevant la dictée de Jean, n’aurait pas toujours conservé l’expression quelquefois incorrecte du Palestinien, mais il l’aurait traduite en grec irréprochable et suivant les règles de la grammaire. Dans ce cas, le rôle de Papias, en écrivant l’évangile, serait à quelque égard semblable à celui, d’un notaire qui