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« Mais, dit-on, la loi juive, qui préoccupe pour ainsi dire à chaque page les auteurs des synoptiques, est en quelque sorte passée sous silence par l’auteur du quatrième évangile. Les idées juives ont disparu, l’horizon s’est élargi. Le cercle étroit dans lequel la loi et les prophètes renfermaient les esprits s’est brisé, pour faire place à l'universalisme chrétien. Le Christ n’est plus le simple Messie d’Israël, c’est le Λόγος de Philon et de Platon. Le langage traditionnel de la Bible est remplacé par la phraséologie des mystiques et des théosophes de l’Orient. Le principe de toutes choses, Ἀρχή, les émanations, l’opposition des ténèbres et de la lumière , sont des emprunts faits à cette gnose qui ne se développe qu’au milieu du second siècle. Chose plus singulière encore, Jean fait parler à Jésus ce nouveau langage ! »

Nous avons déjà énoncé les faits qui serviront de base à nos réponses.

D’abord, il ne s’agissait plus guère, au moment où écrivait saint Jean, de convertir les Juifs à la loi chrétienne, ils avaient pris cette attitude d’opposition opiniâtre qu’ils ont conservée jusqu’à nos jours. Les conversions individuelles étaient toujours possibles, mais la nation en masse résistait à l’ascendant de l’Evangile. C’était au sein du monde hellène et latin que le christianisme multipliait ses conquêtes ; c’étaient les néoplatoniciens, les théosophes d’Orient qu’il s’agissait de gagner aux idées chrétiennes. Saint Jean devait donc s’attacher à reproduire les faits et les paroles qui, dans la vie de Jésus, se rapportaient à la