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partout, ce texte-type auquel ils ont rattaché les additions et les changements que nous remarquons dans les trois Evangiles.

Voilà, Messieurs, une explication des textes communs et des différences particulières aux synoptiques. Cette hypothèse ne m’est point personnelle : on pourrait la retrouver dans les Pères et dans la tradition chrétienne [1] Dans tous les cas, Messieurs, bien que ce ne soit là qu’une conjecture, cette manière d’expliquer l’origine et le problème de la rédaction des Evangiles serait de tout point préférable aux remaniements anonymes, aux systèmes compliqués, contradictoires, impossibles, de l’école rationaliste.

Un mot maintenant sur le quatrième évangile.

Je ne veux point discuter les difficultés élevées contre

  1. Des catholiques éminents, et en particulier le professeur Hanneberg, partagent complètement cette opinion. Schegg, professeur de théologie catholique à Freising, en Bavière, explique la similitude verbale de certains passages des synoptiques par l’évangile de saint Matthieu, écrit en hébreu, suivant l’usage rabbinique de ce temps. C’est là, d’après cet auteur, l’Evangile type. Sous les yeux de 1’Apôtre, deux traductions avec de notables intercalations auraient été élaborées, l’une en syro-chaldéen, l’autre en grec. Le Pentateuque loi aussi, dans des circonstances analogues et pour satisfaire aux mêmes besoins, avait été paraphrasé en chaldaique et traduit en grec. Le texte hébreu de saint Matthieu serait perdu, la version syro-chaldéenne se serait conservée plus longtemps, mais elle aurait été abandonnée à cause des falsifications des hérétiques. Enfin la version grecque serait arrivée jusqu’à nous dans son intégrité, grâce à la vigilante surveillance de l’Eglise et à la grande diffusion de ce texte sacré : il n’est pas facile d’altérer un livre qui se trouve dans toutes les mains. Saint Matthieu avait modifié son texte dans la traduction grecque, les évangélistes l’ont imité. Toutefois Schegg reconnaît la vérité de l’hypothèse du type oral confié à la mémoire. « Les Evangiles, dit-il, montrent les indices évidents de la prédication orale dont ils sont la reproduction textuelle. La prédication imposait son cadre et son type. » C’est aussi ce que dit Reithmayr : « Ce que les hérauts de l’Evangile répétaient de vive voix, dit-il, l’évangéliste s’efforcait de le reproduire dans le Kérygma écrit »