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ne s’y trouve pas. Ce n’est pas seulement dans les citations des livres saints qu’il y a des inexactitudes, on en remarque aussi dans celles que Justin fait des œuvres de Platon. Les auteurs profanes n’avaient pas plus que les auteurs sacrés les scrupules que nous avons aujourd’hui quand nous citons un auteur. Pour n’en nommer qu’un, on a remarqué que Denys d’Halicarnasse, dans ses ouvrages sur la rhétorique, mentionne souvent le même passage en des termes différents ; qu’il reproduit par exemple Isocrate avec de sensibles changements. Des faits semblables s’expliquent, nous le répétons, par la rareté des manuscrits. Il faut ajouter que la forme des livres de l’époque, qui consistaient dans un papyrus ou un parchemin enroulé sur une tige de bois, et le défaut de table et de pagination rendaient difficile la confrontation des textes. Les choses étant ainsi, je demande si l’on peut fonder sur les légères différences des citations de saint Justin avec nos Evangiles un argument prouvant qu’il a existé des Evangiles autres que ceux dont nous possédons les textes ? Evidemment non. Justin écrivait pour des Gentils et des Juifs qui ne demandaient pas l’exactitude des mots, pourvu que l’on conservât l’exactitude du sens. Son but était de donner une idée générale de la Bible, à un point de vue bien différent de celui de la philologie moderne. En agissant de la sorte, il suivait l’usage de son temps. Les apologistes qui ont écrit après lui, à une époque où, de l’aveu de tout le monde, les Evangiles étaient parfaitement connus, n’ont point agi différemment, ainsi que