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par les spéculations orientales. Le christianisme représente la vie d’un Dieu unique par la pluralité des personnes. Mais le Fils et le Saint-Esprit sont coéternels et consubstantiels au Père : ils n’en sortent point par voie d’émanation : enfin le plérome de la Divinité, suivant l’expression de saint Paul, consiste seulement en trois personnes. Valentin en élève le nombre à trente. Ces trente éons, placés en dehors du Père, détruisaient l’unité de Dieu et équivalaient à un véritable polythéisme. Ce n’était pas là un pur caprice de Valentin. Il importait, suivant les religions orientales, à la majesté de Dieu, que l’on plaçât entre lui et la matière, entre lui et l’homme, un nombre considérable d’êtres intermédiaires. De cette sorte, Dieu paraissait plus grand et la matière plus infime. L’Orient, ami du faste et des superfluités, en a mis jusque dans la conception philosophique de Dieu.

Il est d’autres points par lesquels le gnosticisme de Valentin diffère à la fois du christianisme et s’en rapproche. L’hérésiarque admet, par exemple, le double dogme de la chute et de la rédemption, à la condition de l’expliquer à sa manière. Le dernier des éons, la Sagesse, engendre à son tour ; mais son enfantement est malheureux. De son désir intempérant de connaître le premier principe, προπάτωρ, et de son impuissance à s’élever jusque-là, naissent l’erreur, l’ignorance, la crainte, la douleur, le regret. La Sagesse crée la matière et le démiurge, auteur du monde. Le trouble s’introduit par là dans le plérome. Alors viennent successivement trois libérateurs : le dieu