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Marcion avait été autrefois à Sinope un fervent catholique. Mais sa vie s’était bientôt démentie. Il avait commis une faute honteuse en déshonorant une vierge chrétienne qu’il avait séduite. Il était parti pour Rome afin d’y cacher sa honte et ses regrets, et y obtenir l’absolution de son péché. Mais là, rencontrant des délais et des difficultés, il se serait peu à peu éloigné des catholiques et aurait enfin embrassé les doctrines de Cerdon. Il faut observer, Messieurs, que les Pères attribuent souvent la perte de la foi à la. perte de l’innocence des mœurs ; et, en effet, l’orage des passions a préludé souvent au naufrage de la foi. Néanmoins les hérétiques protestent contre cette histoire de la chute de Marcion.

La corruption de l’esprit peut en effet avoir quelquefois une autre cause que la corruption du cœur. Pour concilier le récit des uns et la protestation des autres, les Allemands ont eu recours à une allégorie. Il arrive souvent, disent-ils, que les Pères accusent les hérétiques d’avoir violé une vierge. Mais cette vierge est toute mystique ; cette vierge est la foi chrétienne que les hérétiques corrompent. Quoi qu’il en soit de cette explication, qui ne semble pas très-sûre , au moins pour le cas présent, Marcion, suivant le témoignage très-précis de Tertullien, s’attacha à Cerdon. Il accepta son système, se l’appropria et le développa principalement sous le rapport éthique.

Le système de Marcion est une réaction violente contre le système des Ebionites. Vous savez que ces derniers maintenaient contre saint Pierre et saint Paul l’obligation