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Ici, Messieurs, une difficulté s’élève peut-être dans vos esprits, et vous me dites : les saints Pères accusaient les Ebionites d’avoir mutilé en plusieurs endroits l’évangile de saint Matthieu, mais à leur tour les hérétiques ne soutenaient-ils pas que les catholiques y avaient fait des interpolations ? les saints Pères accusaient les Ebionites d’avoir ajouté des textes étrangers à saint Matthieu, mais les Ebionites ne reprochaient-ils pas aux catholiques de les avoir supprimés ?

Messieurs, aucune discussion ne s’élevait sur ce point entre les Ebionites et les Pères. Les Ebionites niaient l’autorité des Apôtres ; ils les accusaient de s’être trompés, de n’avoir point compris Jésus leur Maître et d’avoir faussé sa doctrine. C’est pour cela qu’ils avaient modifié le texte de saint Matthieu ; ils l’avaient fait publiquement et s’en glorifiaient.

La preuve de ce fait nous est donnée par Eusèbe. Symmaque, le traducteur de l’Ancien Testament, était Ebionite. Il écrivit un commentaire de saint Matthieu, et son livre était plein d’invectives contre l’évangéliste ; mais on n’y trouvait pas un mot contre les prétendues interpolations ; Symmaque ne supposait même rien de pareil. Voici le texte d’Eusèbe : Sciendum porro est, Symmachum qui unus ex illis interprelibus fuity Ebionœum fuisse Exstant certi etiamnum commentarii Symmachi in quibus, adversus Evangelium Matthœi acriter disputans supradictam hæresim adstruere videtur. Atque hos Symmachi commentarios una cum illis sacrœ