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DIXIÈME LEÇON. 215

sacrifices, et portent les noms d’Auguste, Tibère, Julie, Claude, Néron, avec la date de leur émission. Le poids de ces petits bronzes correspond à celui du quadrans romain. Nous avons tout lieu de croire que l’Evangile n’a point désigné d’autres monnaies dans les passages que nous avons cités. Il est cependant une fois question du sicle dans le Nouveau Testament : c’est dans l’histoire de la trahison de Judas. Nous lisons dans saint Matthieu 1 ces paroles du traître : « Quid vultis mihi dare ?... Illi constitueront triginta argenteos (Τριάκοντα ἀργύρια). » Mots que les exégètes traduisent tous par trente sicles. En effet, le texte de Zacharie, XI, 12, que saint Matthieu rapproche de celui des Evangiles, parle de trente sicles et non de trente deniers.

C’était du trésor du temple que les prêtres devaient tirer cette somme. Or, dans le temple, tout était évalué en sicles. La Mischna ne connaît point d’autre monnaie. Le langage sacerdotal ramenait tout au sicle. C’est pour cela que saint Matthieu se sert de l’expression « triginta argenteos. » Voilà donc un indice nouveau de l’exactitude des évangélistes. Trente deniers, c’est-à-dire environ vingt-quatre francs, était une somme qui ne répondait pas à l’importance du service, et semble être un chiffre tout à fait arbitraire, tandis que trente sicles, équivalant à peu près à quatre-vingt-seize francs, étaient juste, d’après l’Exode (XXI, 32), le prix d’un esclave. Cette modique valeur suffisait à tenter une âme aussi vénale que celle de Judas.

1 Matth., XXVI, 15.