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PREMIÈRE LEÇON. 15

lité de scinder l’Evangile en deux, d’en bannir le surnaturel et de n’en retenir que les faits conformes à l’expérience vulgaire. La faiblesse des systèmes hétérodoxes démontre l’impossibilité d’expliquer l’origine des Evangiles autrement que ne le fait l’Eglise. Enfin ces hypothèses, qui troublèrent profondément les esprits et affaiblirent en Allemagne le sens historique, expliquent le scepticisme et la confusion d’où sortirent les audacieuses négations de Strauss.

On a souvent parlé en France de cet écrivain qui poussa la négation en fait d’histoire jusqu’à ses dernières limites, et émut si douloureusement les consciences chrétiennes. Son ouvrage, La Vie de Jésus, traduit dans notre langue, a été plus vanté en deçà du Rhin qu’en Allemagne. Ce lourd produit d’une indigeste érudition n’a guère été lu dans son entier ; et cependant son apparition a été un véritable événement. Deux circonstances expliquent son succès. La philosophie d’Hégel était à son apogée ; et Strauss en appliquait les principes au Nouveau Testament. En second lieu, les systèmes d’Eichhorn, d’Herder et de Schleiermacher avaient produit une telle lassitude et un tel scepticisme parmi les éxégètes, qu’un grand nombre pensaient tout bas ce que Strauss proclamait tout haut. Ce dernier disait le mot de la situation, et publiait ce que la conscience de plusieurs n’osait s’avouer à elle-même. Hégel réduisait le vaste univers, le monde et tout ce qu’il contient, à une pensée. L’universalité des choses était une idée. Jésus-Christ, lui aussi, ne fut pour le jeune