PREMIÈRE LEÇON. 13
La comparaison du récit original avec ses infidèles copies eût ruiné les apocryphes. Tatien a réuni ensemble les quatre Evangiles dans son Diatessaron ; mais les quatre Evangiles ont survécu à son travail.
Herder, l’auteur de la Poésie des Hébreux, développa ces objections avec succès. Il conclut contre l’hypothèse de l’Ur-evangelium, de l'évangile-source ; mais il substitua un second système tout aussi vulnérable que le premier. Non, dit-il, il n’a point existé d’évangile primitif écrit ; car il se serait conservé. Mais il y a eu un évangile primitif oral. Il existait dans la primitive Eglise un corps d’évangélistes qui annonçaient la Bonne Nouvelle, suivant un thème unique et convenu. Ils avaient confié à leur mémoire les discours du Sauveur et le récit des principales actions de sa vie. Ils allaient répétant partout les mêmes paroles. C’était comme un corps de rhapsodes. Mais bientôt ces récits, appris par cœur, se sont embellis et enrichis. Leurs cadres se sont élargis pour recevoir les principales légendes en circulation. Les discours des rhapsodes-apôtres ont fini par être déposés dans des livres ; mais alors ces discours, précédés et suivis d’anecdotes pieuses ajoutées successivement, étaient considérablement altérés, et c’est dans leur état d’altération qu’ils sont parvenus jusqu’à nous sous la forme des quatre Evangiles. Les rhapsodes d’Herder eurent un succès bien éphémère ; ils n’ont guère été connus au delà du Rhin. L’hypothèse, telle qu’elle est formulée, paraît invraisemblable. Comment la tradition ne nous dit-elle rien