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96 LES ÉVANGILES.

l’étude, de la réflexion ; il faut posséder à l’avance des points de comparaison et juger de la valeur d’un enseignement par la faiblesse des enseignements rivaux. Une appréciation de ce genre exige des connaissances variées et dès longtemps acquises. Le peuple, à l’avènement du Christ, était-il dans ces heureuses conditions ? — Quant à la morale de l’Evangile, il ne l’eût pas mieux comprise. La foule sensuelle des païens composait la vie de toutes les licences autorisées par l’exemple des dieux : comment aurait-elle pu comprendre la nécessité de l’humilité, de la mortification et de la chasteté ? Il eut été impossible de lui persuader que la pratique de ces humbles vertus en rétablissant l’homme dans sa dignité, devait un jour détruire l’esclavage. L’histoire nous apprend que les paysans furent les derniers à renoncer au culte des idoles, et leur nom paganus, villageois, est devenu pour ce fait la dénomination générique des adorateurs des faux dieux. Il s’en faut que le christianisme ait été accepté sans l’autorité des miracles, parce qu’il est saint, beau, vrai, sublime : au contraire, la perfection de la morale, la sublimité du dogme constituaient pour les hommes vicieux et ignorants le plus grand obstacle qu’ils aient eu à vaincre pour se décider à embrasser le christianisme. Cette absolue perfection contredisait leurs habitudes d’esprit et la licence de leur vie. Il fallait donc une preuve extérieure et sensible qui persuadât les foules qu’un symbole et des commandements nouveaux étaient apportés par Dieu sur la terre. Il fallait que les peuples fussent témoins de la vie prodigieuse