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SIXIÈME LEÇON. 95

à le faire accepter des philosophes disputeurs et des foules ignorantes et abruties du temps des Césars ? Pensez-vous que les disciples orgueilleux d’Aristote, de Platon et de Zénon eussent accepté les mystères du christianisme, une théodicée qui aurait contredit la leur, une morale opposée à leur morale, et abandonné leur système préféré, renonçant spontanément à discuter le christianisme, à le modifier suivant leurs convenances, c’est-à-dire à altérer, à détruire l’œuvre admirable de l’Evangile ? Il suffit de réfléchir un moment à la nature humaine en général, et à l’opiniâtreté du philosophe en particulier, pour comprendre que celui-ci n’eût point accepté complètement le christianisme par la seule autorité de la raison. Les philosophes ont mis longtemps à comprendre la sagesse et la sublimité de l’Evangile. On n’en compte qu’un très-petit nombre parmi les premiers convertis. Est-ce que les Alexandrins et les Stoïciens n’ont pas été dans les premiers siècles les persécuteurs acharnés de l’Evangile ?

Rappelez-vous Celse et Julien, Plotin et Porphyre. Leur orgueil a-t-il abdiqué devant l’humilité du Christ ? Etait-il facile de soumettre ces esprits superbes au mystère de la résurrection des morts, du retour du Christ à la fin des temps, et à l’attente redoutable du jugement dernier ?

Les foules ignorantes n’eussent pas accepté davantage un Evangile sans miracle. Pour juger de la beauté, de la vérité, de la profondeur d’une doctrine, pour apprécier à sa valeur la théodicée chrétienne par exemple, il faut de