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LA CIVILISATION ET LE GRANDS FLEUVES.

tse-kiang avec la puissante ramure de ses affluents, autant de chemins ouverts par la nature, depuis les frontières de la Mongolie jusqu’à la mer tropicale du Tonkin.

Le parallélisme des fleuves, qui domine toute l’histoire de la Chine, se remarque seulement à l’est du méridien de Tchingtou-fou ; le vaste territoire qui s’étend à l’ouest de cette limite, le Kañ-sou extramural avec le pays de Koukou-nor, les vallées perpendiculaires des grands tributaires du haut Yangtse-kiang, le Yuñ-nañ, sont restés pour la Chine bien plus une aire de colonisation et de vasselage qu’une

    mâle, actif, éthéré, lumineux, est un équivalent ou une attribution du ciel (tian) ; Yin, le principe femelle, est passif, opaque, et, par excellence, terrestre. Le Hoang-ho est le fleuve de la Terre (ti) ; le Yangtse, la progéniture du principe mâle, est de la nature du ciel. Or, d’après le rituel officiel que l’on prétend déjà fixé à l’époque de la dynastie des Tcheou (le Tcheou li), tout ce qui se rapporte au culte de la Terre est marqué de la couleur jaune ; le bleu est symbolique du ciel. Les premiers mots que les enfants chinois apprennent à lire dans le fameux Livre des Mille Caractères sont : « Le bleu est la couleur du ciel, le jaune est la couleur de la terre. » La première de ces propositions serait admise dans toutes les parties du monde, là même où le ciel est le plus souvent gris. Mais cette intime connexion du jaune et du terrestre dans l’ancienne cosmogonie chinoise, nous semble la preuve éclatante que, dans le bassin du Hoang-ho moyen, les immenses étendues du löss ont été le vrai berceau de l’histoire et de la civilisation chinoise. Le yang du Yangtse-kiang n’est pas ou n’est plus figuré dans l’écriture chinoise par le signe du principe mâle, mais par un homophone. La traduction de ce nom par « progéniture du principe mâle » pourrait donc être contestée, car la valeur des mots chinois est fixée bien plus par le signe de l’écriture que par le son ; mais il est certain, que, dans leurs idées cosmogoniques, le fleuve Bleu est un fleuve céleste, yang, tandis que le fleuve Jaune est un fleuve terrestre, yin.