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aux sources du fleuve Bleu ou Bahr-el-Azrak, ait cru et fait croire à quelques savants contemporains avoir définitivement résolu le problème presque cent fois séculaire du Caput Nili, problème qui, depuis la plus haute antiquité, a passionné tant d’hommes éminents[1] et coûté la vie à tant d’explorateurs !

Déjà, dans la dernière moitié du IIe siècle après Jésus-Christ, Claude Ptolémée savait que le fleuve mystérieux arrive de l’hémisphère austral[2], des montagnes de la Lune ; et en effet, Ou-nyamouézi, le nom de la contrée au sud du lac Victoria, est composé de trois mots bantou : ou (pays), nya (particule de relation), mouzi (lune)[3]. D’après le grand géographe alexandrin, le Nil surgit à l’ouest d’un autre fleuve, le Rhaptus ou Rhapta, nom qui — Livingstone le faisait remarquer dans son Dernier Journal – n’est pas sans consonance avec celui du Rovouma.

  1. Lucain, dans sa Pharsale, fait dire à Jules César : « Je renoncerais à la guerre civile, s’il m’était donné de connaître où le Nil prend ses origines. »
  2. Il place les sources du Nil par 10 ou 12e de latitude australe, ce qui est exagéré, mais, dans l’état actuel de l’exploration des affluents du Victoria-Nyanza, on ne saurait, au juste, dire de combien il se trompe. David Livingstone, jusqu’à sa mort, avait adopté l’hypothèse de Ptolémée, puisqu’il cherchait ces naissants dans la région du lac Bangouéolo.
  3. Burton affirme cependant que « Pays de la Lune », se traduirait en bantou par Ou-mouézi, et que la particule de relation nya serait de trop. Mais mouézi signifie aussi « voleur » (probablement celui qui travaille au clair de la lune, de nuit et non de jour). « Pays des Voleurs » serait donc le sens littéral d’Ou-nya-mouézi, la particule de relation étant ici de rigueur. (Voir Lake Regions of Central Africa).