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l’œil du voyageur par leur contraste avec les charmants paysages de la Catalogne, bien moins favorisée, pourtant, quant au volume d’eau des torrents pyrénéens, ces despoblados ne sont point l’œuvre de la nature, mais de Philippe II et de l’Inquisition, des luttes sanglantes et des exterminations en masse qu’amenèrent la déchéance des fueros et de l’autonomie politique de ses habitants. De l’Espagne au littoral campanien, aux Calabres et à la Sicile, du Péloponnèse à l’Asie Mineure et à la Mésopotamie, de la Maurétanie à la Cyrénaique, au désert syrien, à la Palestine et au Chat-el-Arab, des traces manifestes d’une décadence physique du climat et du sol accompagnent sans doute la dégradation historique de tous ces pays, si glorieux autrefois ; mais la science parvient-elle toujours à dire laquelle de ces deux déchéances est la cause de l’autre ? Pourtant, la solution de ce grave problème ne serait pas sans importance pratique : « Si le monde des anciens pouvait être restauré dans sa splendeur première, écrit un penseur américain déjà cité[1], si l’art humain parvenait à reconquérir ces collines désolées, ces plaines désertes, sur la solitude ou sur la vie nomade, sur la dénudation, la déprédation et les miasmes délétères, s’il pouvait leur rendre la fertilité, la salubrité des temps passés, ces millions d’Européens qui vont peupler le Nouveau Monde et qui y portent encore tous les

  1. G. Marsh, Man and Nature.