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de téléphones et de moteurs électriques, nous présentent les vestiges pétrifiés d’une culture préhistorique rebelle à tout progrès. Les Peaux-Rouges de l’Amérique du Nord restent pêcheurs et chasseurs nomades au sein même de la civilisation remuante des Yankees et des Canadiens, peu raffinée, sans doute, mais dépassant en sève et en vigueur la civilisation mère de la vieille Europe. Récemment encore, aux portes des factories plus ou moins prospères que la France, l’Angleterre, le Portugal, l’Allemagne entretiennent sur les rives du golfe de Guinée, la « Grande Coutume » des rois de Dahomey était observée avec une fidélité et une solennité écœurantes : elle se renouvelait tous les ans, à époque précise, sans préjudice des circonstances extraordinaires[1]. L’anthropophagie et les sacrifices humains, les cultes cruels et lascifs qui, en Océanie, commençaient à disparaître au siècle dernier, avant l’arrivée des Européens et, de nos jours, s’y retrouvent sporadiquement, pour ainsi

  1. La « Grande Coutume » du Dahomey a été souvent décrite. Les lettres de MM. J. Poirier et N. Beaudouin, missionnaires français à Porto Novo (Adjaché) (Annales de la Propagation de la Foi, t. XLVIII, 1876), contiennent de curieux détails sur des massacres analogues chez les populations de la côte de Bénin. Voir la lettre plus récente (17 mai 1880) de M. J. Zimmermann, Annales, t. LIII (1881).
    On lit dans le no de mai 1881 de l’Afrique explorée et civilisée, de Genève : « À Bekwaï, le roi a dû jurer à son peuple qu’il abolirait les sacrifices humains… ».
    J’ai cru devoir préciser les dates, car souvent, pour foncer encore la couleur, les vulgarisateurs des connaissances ethnographiques s’appuient sur des documents anciens, au lieu de présenter l’état actuel de la question.