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toutes les jouissances âpres ou délicates qu’il avait épuisées une à une, tous les désirs, toutes les passions meurtrières s’éteignaient en lui lentement au milieu du silence et de la nuit. La paix funèbre du néant l’enveloppa. D’avance, par une sorte de pressentiment mélancolique, il en avait goûté la triste douceur, quand il écrivait cette phrase : « Oh ! seuls les fous sont heureux, parce qu’ils ont perdu le sentiment de la réalité. »

VI

Ce que fut cette agonie de dix-huit mois, quelques-uns nous l’ont dit. On a recueilli les souvenirs du domestique qui le servait à la maison Blanche, de ses amis qui l’y visitèrent ; on a reproduit ce qui pouvait être publié des observations de ses médecins[1].

Mais presque toutes ces révélations sont récentes, postérieures en tout cas à la mort de Maupassant. À partir de la tentative de suicide qui fut rendue publique, le silence se fit peu à peu autour d’un homme qui n’était plus qu’un numéro d’asile. Quelques amis se transmettaient les nouvelles que l’un d’eux allait chercher à la maison Blanche. E. de

  1. A. Lumbroso, pp. 80-104. Louis Thomas, art. cité, pp. 350-353.