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Sa beauté si fort me revient,
Que d’elle seule il me souvient,
Et, de ceste douce pensée,
Naist un ardent desir d’amour,
Qui rend mon ame nuict et jour
D’un traict de langueur traversée ;

Langueur qui me plairoit bien mieux
Si ses beaux et aimables yeux
Cognoissoient le mal que j’endure ;
Mais las ! Mes feintes cruautez
Me les ont si loin escartez
Qu’ils ne peuvent voir quand je pleure.

Amour, hé ! Fais les revenir,
Et m’en donnant le souvenir
Donne m’en aussi la présence.
Par mon œil de larmes baigné,
N’ai-je pas assez tesmoigné
Que je recognois ta puissance ?

Lorsqu’elle souspiroit ainsi,
Le berger, rongé de soucy,
Parut sur le bord d’une prée,
En qui l’aurore par ses pleurs
Avoit renouvellé les fleurs
Dont sa face estait diaprée.