Page:May - Les Pirates de la Mer Rouge, 1891.djvu/78

Cette page n’a pas encore été corrigée
76
sur les bords du nil

Nos bateliers nous dirigèrent adroitement dans ce conduit. Sur un signe du conducteur, une porte basse s’ouvrit el nous quittâmes le bateau.

Un esclave noir grimaça un sourire sur notre passage, puis s’inclina jusqu’à terre ; nous ne prîmes pas garde à ses révérences et continuâmes d’avancer dans l’intérieur du bâtiment.

Quoique je ne me fusse point attendu à de grands frais d’architecture en ce lieu, la nudité des murailles, le manque d’ouvertures à l’intérieur et le délabrement du bâtiment me surprirent. Nous traversâmes un jardin dont les plantes avaient peut-être autrefois réjoui les yeux des captives du harem, mais en ce moment tout y élait desséché et flétri ; rien ne rappelait l’idée de la vie en ce triste séjour, sinon une nichée d’hirondelles voletant et piaillant dans les trous des vieux murs.

Une seconde porte nous arrêta avant d’entrer dans une petite cour, au milieu de laquelle se trouvait un bassin rempli d’eau. Le canal devait arriver jusqu’à ce bassin par des conduits souterrains, et j’admirai avec quel soin on avait disposé cette eau de manière à rafraîchir l’habitation et à maintenir l’humidité si nécessaire dans ces pays brûlants. Je remarquai aussi avec quelle intelligence cette espèce de château avait été orienté pour éviter les inconvénients de l’inondation du Nil, qui a lieu chaque année.

La cour où nous venions d’entrer était entourée en partie de grillages en bois, derrière lesquels semblaient s’enfoncer des retraites et des salles assez vastes ; mais je n’avais pas le temps d’examiner ces singulières dispositions ; je jetai un coup d’œil sur Halef, qui me suivait chargé de ma boîte à médicaments ; notre guide nous entraîna rapidement.

Bientôt nous arrivâmes dans le Selamlik[1], une pièce assez spacieuse, presque obscure, dont les fenêtres grillées ne laissaient passer que de rares filets de jour. Les murailles, revêtues de tapis à certains endroits, peintes d’arabesques en d’autres, en somme fort ornées, faisaient contraste avec la nudité de l’extérieur ; dans une niche sculptée se jouait un joli petit filet d’eau destiné à rafraîchir l’air. Une balustrade séparait la chambre en deux. La première partie servait aux domestiques ; dans le fond se tenaient le maître de la maison et ses hôtes. Cette espèce de

  1. Salon ou parloir.