pas ces chevaux, parce que ton bon cœur te commande de m’en donner un.
— Allah guérisse ton intelligence ! je ne vends ni ne donne mes bêtes.
— modèle de générosité, tu veux gagner quatre fois le paradis, car tu vas me donner les quatre chevaux : j’en ai besoin pour mon voyage.
Allah kérim ! cet homme est un déli (fou), il a perdu l’esprit.
— Songe, mon frère, que les fous prennent ce qu’on leur refuse. Regarde, nous sommes deux ; tu rendras peut-être à celui-ci les bêtes qui lui appartiennent ! »
Lindsay venait de sortir de sa cachette et se plaçait à mes côtés ; les Arabes comprenaient à présent ce que nous voulions. Le chef mit sa lance en arrêt, pendant que je lui criais :
« Rends-nous les chevaux volés ce matin par tes gens !
— Créature misérable ! tu es vraiment fou ! Si nous vous avions volé vos chevaux, auriez-vous pu nous rejoindre à pied ?
— Peut-être ! Écoute : tu sais bien que ces quatre chevaux appartiennent aux Francs débarqués hier au soir sur cette rive. Comment as-tu pu croire que les Francs laisseraient ce vol impuni ? Ne sais-tu pas qu’ils sont plus forts et plus habiles que toi ? Tu le vois, nous avons retrouvé ta trace. Cependant, comme je n’aime pas à répandre le sang, je te somme de me rendre les chevaux, puis nous te laisserons continuer ta route en paix.
— Vous n’êtes que deux et nous sommes six ! » reprit l’Arabe en ricanant.
Il brandit sa lance pour fondre sur moi. Je tirai en visant son cheval : la monture et le cavalier tombèrent. Un second coup atteignit un autre cheval ; nous profitâmes de l’étonnement de la troupe pour nous élancer sur nos chevaux, dont les Arabes avaient abandonné la bride.
Nous lançâmes nos montures au galop ; les Arabes criaient et tiraient, mais nous étions déjà loin avant qu’ils eussent relevé leur chef.
Nous fîmes un long détour pour retrouver le gué, et nous arrivâmes heureusement à nos tentes. L’Anglais semblait radieux.
Il voulait écrire de suite la relation de ses prouesses pour