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UNE AVENTURE EN TUNISIE

« Eh bien, dis-je, ralentissons le pas pendant la grande chaleur, mais marchons jusqu’à la nuit : autrement les brigands nous échapperaient.

— Sidi, celui qui trop se hâte n’en arrive pas plus tôt, car Allah conduit tout. »

Nous étions devant une chute assez rapide du ouadi (ruisseau), lorsque nous aperçûmes, à la distance d’un quart de lieue environ, deux hommes occupés à puiser un peu d’eau potable au fond d’un petit sobha (marais), tandis que leurs chevaux cherchaient une maigre nourriture dans un plan de mimosas.

« Les voilà ! murmurai-je.

— Oui, Sidi, ce sont eux. Ils ont chaud et se sont décidés à laisser passer l’ardeur du jour.

— Peut-être se sont-ils arrêtés afin de partager le butin. Reculons, Halef, reculons. Quittons le ouadi et chevauchons du côté du chott el Rharsa.

— Pourquoi cela, Effendi ?

— Pour qu’ils ne devinent pas que nous avons rencontré le cadavre. »

Nous remontâmes sur les hauteurs de la rive et nous tirâmes vers l’ouest, puis nous revînmes en décrivant une courbe. Les malfaiteurs étaient, du reste, trop enfoncés dans le creux du marais pour nous avoir aperçus. Ils se relevèrent lorsqu’ils nous entendirent approcher, car ils étaient accroupis auprès du filet d’eau. Tous deux saisirent leurs armes. Je les imitai, affectant la surprise ; cependant je ne jugeai pas nécessaire de préparer mon fusil.

« Salam aléïkoum ! leur criai-je en arrêtant ma monture.

— Aléïkoum ! répondit le plus âgé. Qui êtes-vous ?

— Des cavaliers paisibles.

— D’où venez-vous ?

— Du désert.

— Où allez-vous ?

— À Seddada.

— Quelle est votre race ? »

Je montrai Halef et repris :

« Celui-ci est de la plaine d’Amar ; j’appartiens aux Beni-Sachsa[1]. Et vous, qui êtes-vous ?

  1. Fils des Saxons.