Le premier jour se passa sans incident. Le surlendemain, je demandai au cheikh la permission de faire une promenade. On me donna un chameau ; on me supplia d’être attentif et prudent, d’éviter surtout de trahir le lieu du campement. J’espérais qu’on me laisserait aller seul ; mais, au moment où je montais sur ma bête, la fille du cheikh s’avança vers moi en me disant :
« Effendi, me permets-tu de l’accompagner ? »
Impossible de refuser une si aimable proposition.
Lorsque nous fûmes sortis de l’étroit chemin, je me dirigeai machinalement du côté de la Mecque.
Mon amazone ne fît aucune observation, et continua de marcher à mes côtés sans m’adresser un seul mot. Au bout d’un quart de lieu environ, elle se retourna, puis me dit impérieusement :
« Suis-moi, Effendi.
— Où donc ?
— Je veux voir si la sentinelle est à son poste. »
Au bout de cinq minutes, nous aperçûmes l’homme chargé de garder les environs du campement assis sur la pointe d’une roche ; il avait la tête tournée vers le sud.
« Il ne peut nous voir, murmura l’Arabe ; viens, Sidi, je te conduirai où tu veux aller. »
Que signifiaient ces mots ? Elle me fit prendre un peu à gauche et me regarda en souriant. Laissant trotter nos montures, nous arrivâmes dans une étroite vallée ; la fille du chef s’arrêta, s’assit à terre et m’invita à l’imiter.
« Viens, dit-elle, assieds-toi près de moi ; causons ! »
Je n’étais pas peu étonné de ce début ; elle poursuivit :
« Effendi, crois-tu que ta foi soit la vraie foi ?
— Certainement, je le crois de toute mon âme, répondis-je.
— Eh bien, moi aussi. »
Mon étonnement croissait ; c’était la première fois que j’entendais une semblable parole sur des lèvres mulsumanes.
« Oui, Effendi, je sais que ta religion est la seule bonne.
— Comment sais-tu cela ?
— Je le sais par mon propre cœur. La première demeure qui fut donnée à l’homme était le paradis ; toutes les créatures y vivaient en paix les unes avec les autres, sans se nuire en aucune sorte. Allah le voulait ainsi, et c’était là la vraie religion. La foi