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MOMENT DE VERTIGE

corrigeant d’un baiser ce que la phrase pouvait avoir de blessant, tu as vivoté toute ta jeunesse ici à la campagne, sans excitation, sans plaisirs, sans sorties dans le monde, sans théâtre, sans luxe… te contentant d’être un ange pour papa et pour Jacques et moi ! Mais vois-tu, maman, je ne veux pas d’une vie arriérée, moi, je veux autre chose ! Le siècle a marché depuis ton temps !

— Et qu’est-ce que tu veux donc, ma petite fille, fit madame Beauvais, en riant, un amoureux ? un mari ?

— Ce que je veux ?… Ne pas végéter loin de la ville ! Je veux la grande vie, le luxe, les voyages, les choses nouvelles… l’enivrement d’une existence comme on peut s’en faire une aujourd’hui… et je n’épouserai qu’un homme qui pourra me donner tout ça ! Je te jure, maman, qu’il aura de l’argent ton gendre… et que je saurai la lui dépenser ! ajouta-t-elle en riant.

Madame Beauvais sourit avec indulgence à ces propos indépendants de sa fille, mais elle resta songeuse… Se pouvait-il que leur bonne vie heureuse fut une existence arriérée ?… Arriérée, leur vie ? Allons donc ! Son mari ne se servait-il pas des données les plus modernes de la science médicale, des instruments les plus perfectionnés ? Ne se tenait-il pas au courant de toutes les nouvelles découvertes ? Arriéré lui ? Mais ne passait-il pas à étudier les rares loisirs que lui laissait sa