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MOMENT DE VERTIGE

— Quel chagrin, carissima ? Puis-je le demander sans indiscrétion ?

Laure regarda autour d’elle et voyant que les deux jeunes filles restaient auprès de leur amie, elle se retourna vers Luigi et dit à demi-voix :

— C’est une chose qui date de cinq ans. Je ne vous ai jamais dit que j’ai un fils, l’ainé de mes enfants… Il voulut s’enrôler pour la guerre, cette terrible guerre dont votre main, Luigi, porte la blessure… mais à cause d’un léger défaut à la jambe il ne fut pas accepté. Pendant deux ans il occupa une position dans une banque, à Montréal et il fit si bien que, malgré sa jeunesse, on le transféra comme gérant d’une succursale à un village, qui porte le nom de Rexville[1]… À ces mots, Luigi eut un mouvement de surprise qu’il domina aussitôt. Sans s’en apercevoir, Laure continua :

— Quelques temps après son installation, il y eut un vol considérable à la banque de Rexville. Pierre fut impliqué mais libéré faute de preuves… mon mari lui fit une scène terrible et Pierre quitta la maison disant qu’on ne le reverrait plus ! Les coupables ne furent jamais découverts et Pierre a disparu ! Paul ne s’est jamais pardonné sa rigueur, ni moi mes doutes ! Il ne trouvait aucune preuve de la culpabilité de notre fils, mais son orgueil paternel souffrait et aussi sa fierté professionnelle.

  1. Nom fictif.