Page:Maxine - La huronne, 1943.djvu/10

Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
LA HURONNE

La femme du docteur était morte l’année qui avait suivi le mariage de Berthe et de Pierre.

La jeune veuve avait deux enfants : Gabrielle, l’aînée, pensionnaire chez les Dames de la Congrégation et Marc, âgé de treize ans, dont la santé délicate ne permettait pas la vie de pension, et qui suivait des cours privés, donnés par un jeune professeur, ami de la famille.

Au moment de la guerre, Pierre-Marc Granville habitait avec sa famille dans l’Ouest canadien.

En 1916, il avait rejoint un régiment volontaire de Winnipeg qui partait pour la France. À Cambrai où il s’était distingué par son courage et par sa capacité militaire, il avait été englouti par l’explosion d’un obus, au printemps de 1917.

La famille tant aimée qu’il laissait dans les vastes prairies du Manitoba, revint alors à Montréal, où elle habitait depuis, chez le père de l’officier, le docteur Granville.

Ce dernier avait accueilli de tout cœur sa fille adoptive et les orphelins, et dans le grand home confortable qui avait abrité son enfance, Berthe sut mieux endurer son malheur ; la jeune veuve et le vieillard avaient pleuré les mêmes larmes et se consolaient des mêmes espoirs, en voyant s’épanouir les deux jeunes vies confiées à leur tendresse.

Le docteur était un grand et robuste vieillard, portant lestement ses soixante-dix ans, gai de caractère, indulgent pour son entourage, mais intransigeant sur les questions d’honneur.