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LA CACHE AUX CANOTS

Celui qui parlait ainsi était un tout jeune prêtre dont la voix chaude et vibrante trahissait l’ardeur apostolique ; sa figure imberbe avait les traits d’une finesse presque féminine, une douceur angélique était empreinte sur son visage, mais le pli décidé de la lèvre et la forme accusée du menton dénotaient l’énergie et une rare fermeté de caractère. Élevant son regard vers le ciel, il murmura à demi-voix :

— Merci, mon Dieu, de me les faire voir ainsi pour la première fois, auréolés de lumière, ces pauvres indigènes ! Je jure de consacrer à leur conversion tous les instants de ma vie !

Tandis que l’on s’épanchait ainsi à leur sujet, les villageois, groupés sur la rive, discouraient aussi sur le compte des arrivants :

— C’est la Robe-Noire qui nous revient, dit un jeune garçon ; il amène un compagnon.

— Les Visages-Pâles arrivent au bon moment, dit un autre, ils vont pouvoir assister à notre fête.

— Notre fête ? Laquelle ?

— Tiens, notre prisonnier, l’Iroquois, tu sais bien !

— Hé[1]. C’est vrai, son supplice est pour demain… mais mon père dit que les Robes-Noires n’aiment pas ces fêtes !

  1. Oui (les Indiens disaient souvent pour oui).