— Tu as raison, approuva La Salle, après une de ces discussions ; attendons qu’il soit un peu plus âgé ! »
Peu à peu, cependant, les leçons journalières du religieux commencèrent à fructifier dans cette belle mais sauvage nature ; il se mit à réfléchir ; il se demanda s’il ne devait pas, après tout, devenir, lui aussi, un chrétien, comme chef La Salle, chef Tonty… Un jour, il demanda au Chaouanon :
« Pourquoi, Nika, n’es-tu pas chrétien, toi ?
— Je n’ai jamais beaucoup songé à cela, mon gars ; vois-tu, j’ai presque toujours été en voyage… Plus tard, je le deviendrai, peut-être…
— Penses-tu, Nika, que le fils de l’Aigle puisse prendre la religion des Blancs ?
— Hé, pourquoi pas, s’il le désire ?
— Dans le pays des manitous, père ne serait pas fâché contre son Aiglon ?
— Non ; tu ne lui feras aucune peine.
— Alors, je vais y penser vraiment », dit l’enfant, que la grâce avait touché à son insu.
Vers le printemps, il demanda lui-même à être baptisé. Ce baptême ne pouvait être donné que sous condition, parce que l’adolescent était probablement déjà baptisé ; il voulait Nika pour parrain, mais celui-ci ne pouvait l’être, n’étant pas chrétien lui-même. Alors, ce fut Cavelier de La Salle qui servit de parrain, et une Algonquine récemment baptisée fut la marraine. On lui donna les noms de Robert-Henri, en honneur des deux commandants ; il devait porter le nom de Robert, mais pour tous, il continuait toujours d’être l’Aiglon Blanc.
Le père Membré essaya aussi de lui apprendre à lire, mais ce n’était pas chose facile que de tenir sagement à regarder un livre ce remuant jeune néophyte, et les résultats de cet essai ne furent pas brillants !
Quand vint l’été, l’Aiglon reprit son pagne et sa parure de plumes blanches, sauta plus que jamais d’arbre en arbre