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l’aiglon blanc des illinois

« Chef Tonty, dit-il, un soir, pourquoi gardes-tu toujours une de tes mains couvertes ?

— C’est parce que celle-là est une main de fer ; je la tiens gantée.

— Mais ta vraie main ?

— Je l’ai perdue par l’explosion d’une grenade, dans les guerres siciliennes.

— Tu es donc un grand guerrier ?

— Plutôt un voyageur qu’un guerrier, maintenant ; mais dis-moi, jeune Aiglon que signifie le beau tatouage que tu as sur la poitrine ?

— C’est l’emblème des chefs de ma tribu, dit fièrement l’adolescent ; mon père avait un tatouage semblable.

— Les chefs seulement ?

— Hé, les chefs et leurs fils ; quand j’aurai l’âge requis, je me ferai sacrer chef de la tribu.

— Quel est l’âge voulu ?

— Seize fois les douze lunes.

— Ah ? Mais, dis encore, toutes ces marques qui garnissent tes bras, tes jambes… des emblèmes de famille ?

— Non ; celles-là marquent des événements ; ainsi ce poisson indique que j’ai failli me noyer, et qu’il m’a fallu nager, nager, comme un vrai poisson !

— Et ces petites ailes dessinées sur tes chevilles ?

— Celles-ci, dit l’Aiglon en riant, rappellent un épisode : un jour, il y a deux ans, en voyage avec mes parents au pays des Chakasas, un Visage-Pâle qui connaissait mon père, fut étonné de mon agilité et il dit à père : « Ton fils ressemble au dieu Mercure » — « je ne connais pas ce manitou, dit père. — Non ? Et bien, c’est un dieu qui a les pieds ailés… quand il marche, il vole ! » Alors, père fit tatouer des petites ailes sur mes chevilles en souvenir de ce discours.

— Et cette autre marque sur ton bras droit ? Elle est rouge, celle-là, et les autres sont bleues !